Tournesol et Jean Ferrandis : improvisations sur le prénom des patients
Depuis 9 ans, Tournesol, Artistes à l’Hôpital a la chance de travailler avec Jean Ferrandis, flûtiste de rang international. Le projet de l’artiste est fort de sa remarquable originalité : dans chaque chambre, il propose aux patients d’improviser une mélodie à partir des lettres de leur prénom. Complétant sa prestation par des morceaux du répertoire classique, il offre un moment artistique personnalisé d’une qualité époustouflante.
 « C’est Pan lui-même ! » : Retour sur la carrière d’un flûtiste virtuose
Après avoir obtenu le Premier Prix à l’unanimité du Conservatoire National Supérieur de Lyon en 1985, et gagné le Grand Prix du Concours international de flûte du Printemps de Prague l’année suivante, Jean Ferrandis amorce une carrière orientée vers l’international. Enchainant les concerts à travers l’Europe, l’Asie et l’Amérique du Nord, il fréquente les salles les plus prestigieuses (Berlin, Tokyo, Paris, Barcelone, Budapest, New York…) et joue sous la direction de grands maîtres : Tibor Varga, Yoram David et Leonard Bernstein. Ce-dernier cèle sa réputation en s’exclamant, lors d’une exécution du concerto de Mozart K314 : « C’est Pan lui-même ! ».
Pourtant, le prestige importe moins à Jean Ferrandis que son désir de rencontre, une motivation au cœur de son engagement fidèle au sein de l’association Tournesol, Artistes à l’Hôpital : « L’association Tournesol réalise un travail fantastique, et je les aide dès que je le peux », affirme-t-il. Depuis 2005, chacun de ses passages à Paris sont l’occasion de performances exceptionnelles dans plusieurs de nos hôpitaux partenaires.
Un projet singulier et surprenant: improviser sur le prénom des patients
Cette proposition, presque magique au premier abord, se fonde sur un système relativement simple : à partir de la notation anglo-saxonne, le musicien associe chaque lettre du prénom à une note de musique, et conçoit un arrangement autour du thème ainsi formé. Ce procédé est hérité de Jean-Sébastien Bach, qui en avait usé pour composer une cantate inspiré de son propre nom, ainsi qu’un morceau dédié au prénom de sa seconde femme, Anna Magdalena.
Par ce travail de composition et d’improvisation, Jean Ferrandis défend l’idée de valoriser non pas sa maestria mais la singularité de son auditeur : « Je leur joue un morceau personnalisé, et ça les touche. Ils se sentent directement concernés par la musique ». Car l’artiste a abondamment réfléchi aux enjeux liés aux publics hospitalisés : « Ils sont émus qu’on leur parle d’eux, dans un contexte où leur personne est mis entre parenthèses ». Il est vrai que dans le cadre de leur prise en charge médicale, les patients ne sont plus appelés que par leur patronyme ; Jean Ferrandis, en jouant leur prénom, rend hommage à la personnalité de chacun : Cela les surprend souvent. Cela peut les rendre tristes également. Ce sont des moments très forts ».
Récit de moments musicaux uniques, entre ravissement et nostalgie
Jean Ferrandis a déjà visité un grand nombre de services hospitalisés avec l’association Tournesol, Artistes à l’Hôpital. Dernièrement, les unités de gériatrie de l’hôpital Sainte-Périne AP-HP et le service de greffe de moelle osseuse de l’hôpital Saint-Louis AH-HP ont eu le plaisir de l’accueillir. Dans l’une des chambres, la femme qui nous accueille nous exprime toute son émotion quand l’artiste lui affirme : « Cette mélodie, c’est vous ! ». Une autre lui demande une seconde improvisation : « C’était une première ! Ca me fait très plaisir qu’elle ait autant aimé… mais ça me demande beaucoup d’imagination ! » témoigne Jean Ferrandis. La relation se prolonge parfois au-delà de la musique : quelques paroles personnelles échangées entre l’artiste et une patiente donnent lieu à une conversation enjouée en italien ! Si certains auditeurs laissent transparaître des signes de nostalgie, aucun ne prive l’artiste de ses remerciements chaleureux.
Les patients ne sont pas les seuls à profiter de cette visite insolite.  Jean Ferrandis se produit également à l’attention du personnel soignant, notamment à l’hôpital Saint-Louis AP-HP où, à l’occasion de notre dernier passage, sept infirmières nous ont accordé quelques minutes de leur temps précieux. Le prénom de l’une d’entre elles a été sélectionné puis mis en musique. Un moment « sur des petits nuages » vécu comme une « bouffée d’air frais » au sein de leur longue journée.